Liens vers les pages web anciennes du KKE

Les sites internationaux du KKE sont déplacés progressivement à un nouveau format de page. Vous pouvez trouver les versions anciennes des pages déjà mises à jour (avec tout leur contenu), en suivant ces liens.

Chypre, unifiée, indépendante, son peuple étant souverain

Interview de T. Pafilis, Membre du CC du KKE et représentant parlementaire du parti, à la chaîne de télévision « MEGAONE » à Chypre

1. Le KKE ne se préoccupe-t-il pas du fait que sa décision pourrait avoir un effet négatif sur l'AKEL, avec qui il entretient des relations particulières, et même dans une période où le processus de résolution de la question chypriote, qui est également soutenu par l’AKEL, est mis en cause par divers côtés?

 

La position du KKE résulte de sa profonde solidarité internationaliste avec la classe ouvrière et les couches populaires de Chypre, les Chypriotes grecs et les Chypriotes turcs, les Arméniens, les Maronites et les Latins, et s'oppose aux intérêts des monopoles qui favorisent un nouveau plan dichotomique afin qu'ils puissent prendre le contrôle des ressources naturelles sans aucun obstacle. La direction de l'AKEL a fait ses choix et son accord avec le cadre gouvernemental et présidentiel, un cadre soutenu par les États-Unis, l'UE et surtout l'Angleterre, est erroné, sans perspectives et conduit le peuple chypriote à de grands dangers.

 

2. L'AKEL, malgré le fait qu'il n’oublie pas les luttes du KKE, comme il le mentionne dans sa déclaration, indique néanmoins clairement au Parti communiste de Grèce que «la façon dont l'avenir de Chypre sera façonné est une question concernant les Chypriotes et en dernière analyse ce sont eux qui en décideront ».

a) Ne pensez-vous pas que dans une phase aussi cruciale du processus, votre politique de «révision» pourrait éventuellement faire exploser cette situation?

b) Comprenez-vous le message très clair que l'AKEL vous envoie?

 

Le peuple de Chypre a le premier mot, qui, tout comme en 2004, doit rejeter la nouvelle solution dichotomique, mais le problème est plus complexe. Je tiens à vous rappeler qu'en 2004, le KKE était le seul parti au Parlement grec à organiser des mobilisations contre le «plan Annan» et grâce à la pression exercée par lui une déclaration conjointe en faveur du plan a été empêchée lors de la réunion des chefs de partis appelée alors par le Président de la République en Grèce.

Cependant, il est évident que la question chypriote, alors qu'il s'agit d'un problème international d'invasion et d'occupation, intéresse les autres peuples aussi. Tout développement créera aussi des faits accomplis pour d'autres peuples. En outre, comme vous le savez bien, diverses « solutions », telles que, par ex. celle décrite dans le plan Annan, sont non seulement injustes et non viables, mais elles empêtrent les peuples de la Grèce et de la Turquie dans de grands dangers.

L'axe principal des positions du KKE reste en place et s'enrichit, mettant en évidence de manière décisive la position d'un État et non de deux.

La position du KKE renforce la lutte du peuple chypriote pour une Chypre unifiée et indépendante.

 

3. Considérez-vous que votre nouvelle position politique peut être acceptée par les Chypriotes turcs pour que le processus puisse se progresser?

 

Elle peut également être acceptée par les travailleurs chypriotes turcs. Comme vous le savez, le KKE suit de près les développements et prend ses positions de manière responsable après avoir étudié le problème chypriote. Le KKE n'a même pas jamais oublié que le problème chypriote est un problème international de l'invasion et de l'occupation de la partie nord de Chypre par la Turquie. Il est marqué par l'intervention de l'OTAN et les plans impérialistes plus généraux dans la région. Il porte la marque des classes bourgeoises de la Grèce, la Turquie et de Chypre, des nationalistes, du système capitaliste lui-même, qui cause les guerres impérialistes. Nous n'avons pas reculé d'un pouce en ce qui concerne notre la position pour une Chypre unifiée, indépendante, avec une seule souveraineté, une citoyenneté et une personnalité internationale, sans bases et armées étrangères, sans garants et protecteurs étrangers, le peuple étant souverain et maître dans son propre pays. D'autres ont reculé et recherchent depuis de nombreuses années une solution à l'intérieur de l'UE, par la création des États constituants et avec la prétendue «contribution amicale» des États-Unis et d'Israël.

Nous, en tant que KKE, avons une vision globale de ce qui est dans les intérêts du peuple aujourd'hui. Nous croyons que l'issue se trouve dans la lutte contre le système d'exploitation, pour le pouvoir ouvrier-populaire et la socialisation des richesses, le désengagement des organisations impérialistes, de l'UE et de l'OTAN, la formation de conditions pour des relations internationales qui seront basées sur l’intérêt commun. C'est quelque chose qui concerne tous les pays et la Chypre et son peuple, et clairement les Chypriotes turcs. Ceci est lié dans son ensemble à la lutte commune et coordonnée de la classe ouvrière et des couches populaires en Grèce, à Chypre, en Turquie et dans les autres pays de la région.

Alors, si vous caractérisez l'abandon de la Fédération bicommunautaire-bizonale comme une « nouvelle position politique », nous devons noter que depuis deux ans nous avons cessé de nous y référer. C'est-à-dire à partir du moment où il est devenu très clair que ce terme est utilisé comme un alibi pour un nouveau plan dichotomique de deux états, pour la «ghettoïsation». Le KKE, qui était toujours en faveur d'une Chypre unifiée (un État et non deux), qui lutte constamment contre le nationalisme, n'a d'autre option que de prendre position contre la «bizonalité» et les deux «États constituants» qui recyclent la division du peuple sur une base ethnique, linguistique et religieuse, et d'exprimer la nécessité de l'organisation unifiée et de la lutte commune de la classe ouvrière et des couches populaires de Chypre, des Chypriotes grecs et des Chypriotes turcs, des Arméniens, des Latins et des Maronites contre les bourgeois, contre l'UE et l'OTAN.

 

4. Selon vous, est-il possible de mettre en œuvre ce que vous proposez - achever le processus de résolution de la question chypriote et réunifier la Chypre et son peuple, surtout si l'on tient compte les faits de l'augmentation des flux de colons, l'altération de la population, l'isolement et la dépendance croissante des Chypriotes turcs et des zones occupées, de la Turquie, et du fait accomplis qui se crée sur le territoire chypriote?

 

Si la promotion d'une fausse euphorie est dangereuse, c'est-à-dire qu'il existe des conditions qui mèneront à une solution juste de la question chypriote, il est tout aussi dangereux pour le peuple de se soumettre, misérablement, au rapport de forces négative actuel. Le rapport de forces, cependant, peut changer et cela ne peut pas se produire que si les peuples luttent, sur la base de leurs intérêts de classe communs, s'ils entrent en conflit avec les monopoles et le capitalisme. La soumission au rapport de forces négative conduit à une position qui dit: «Tue-moi, Aga, et fais de moi un saint.» [I]

 

5. Êtes-vous en désaccord avec la conviction de l'AKEL, selon laquelle «l'abandon d'une fédération bizonale-bicommunautaire ne conduit pas à un état unifié mais à une division catastrophique pour Chypre»? Si oui, quelle est l'alternative?

 

Dans la décision du CC du KKE, il est souligné comment la Fédération bicommunautaire-bizonale a été formée dans le temps, qui est aujourd'hui promue comme le "cœur" de la solution du problème de Chypre. Il est souligné que, dans les années 60, la bourgeoisie turque, méthodiquement et de façon planifiée, a tenté de créer un fait accomplis visant à la création de deux États, en utilisant les problèmes des accords de Zurich-Londres, la position de l'union de Chypre avec la Grèce, l'activité des forces nationalistes des deux côtés, et plus encore le coup d'État qui a été organisé à Chypre sous la responsabilité de la junte militaire en Grèce. Il est également noté que le processus de formation des zones spécifiques a été utilisée, où les Chypriotes turcs avaient été transférés. Ces objectifs de la Turquie de former une zone territoriale chypriote-turque ont été achevés par l'invasion et l'occupation avec "Attila 1" et " Attila 2", en juillet et août 1974 respectivement. Après l'invasion, l'État turc a travaillé systématiquement pour imposer la position d'une Fédération bicommunautaire-bizonale et pour inclure cette position -comme un compromis- dans les matériaux des négociations, en tant que base de sa part pour une solution dichotomique, confédérale, de deux États. En 1983, la "République turque de Chypre du Nord" a été déclarée et le faux état a été utilisé une fois de plus pour créer un fait accomplis. Qu'est-ce qui a été démontré alors? Qu'en pratique, une position de tactique, un «compromis final» de la partie chypriote-grecque, qui a conduit à la position d'une Fédération bicommunautaire-bizonale, a ensuite été transformée en position de principe et en base pour la solution de la question chypriote. Aujourd'hui elle est utilisé pour légitimer l'invasion et l'occupation, par la création de deux États constitutifs. La vie elle-même démontre combien cette position, qui conduit à la division du peuple de Chypre et à des complications pour les peuples de la Grèce, la Turquie et l'ensemble de la région, est dommageable. La solution dichotomique doit être abandonnée dans l'intérêt des peuples et à l'encontre des plans des États-Unis, de l'UE, des classes bourgeoises et des monopoles.

 

6. N'êtes-vous pas préoccupé par le fait que votre position pourrait éventuellement être exploitée, comme selon l'AKEL "Certains cercles et forces à Chypre qui jusqu'à récemment insultaient le KKE sur une base quotidienne, maintenant ils se sont pris d'affection pour lui en raison du changement de position sur le problème de Chypre?

 

Le KKE a une histoire de 100 ans; il n'est pas entré en politique hier. Il a une longue histoire, avec des luttes dures et sanglantes, qui se continuent aujourd'hui dans les conditions contemporaines. Le développement de la lutte de classe, les intérêts du peuple, la construction d'une société sans l'exploitation de l'homme par l'homme, le socialisme-communisme sont notre "boussole". Nous nous opposons à la participation des partis communistes aux gouvernements bourgeois, à la gestion de la barbarie du capitalisme et nous luttons pour son renversement. Or, si certains affirment qu'ils «aiment le KKE» mais soutiennent le capitalisme, l'UE et l'OTAN contre laquelle le KKE combat, il est évident qu'ils le font pour leurs propres raisons, et cela s'applique également à ceux qui déclarent que le KKE «sera toujours profondément enraciné dans nos cœurs», mais ont soutenu SYRIZA et son gouvernement qui met en œuvre la ligne politique la plus barbare et antipopulaire au cours des dernières années en Grèce.

Nous avons confiance dans les peuples, dans leur critère politique, leur expérience, et en fin de compte ils "mettront chaque fripouille à sa place " et sépareront "le bon grain de l'ivraie".

 

03.11.2016

 

[I] Un dicton grec traditionnel qui signifie que quelqu'un accepte son propre meurtre passivement, sans aucune résistance.

 

 03.11.2016